«Pourquoi moi?», se demande le petit Hongrois sauvé par Michael Jackson

 

 

 

Michael avait financé sa greffe du foie par l'intermédiaire de sa fondation Heal The World.

Sur une route cabossée du village de Miske (sud), il débarque à vélo.
Les cicatrices bardant sa cage thoracique témoignent de trois tentatives de greffe du foie qui n'auraient jamais été réalisées sans le concours d'un ange-gardien inattendu nommé Michael Jackson. Le chanteur sortit 150.000 euros via sa fondation Heal The World afin de sauver ce garçon malade croisé il y a vingt-cinq ans à l'hôpital Bethesda de Budapest.

À ce moment-là, Tamás s'appelait encore Béla et les médecins se préparaient au pire, faute d'organe disponible. Abandonné par ses géniteurs, l'enfant au teint livide toucha le cœur de la star venue tourner un clip promotionnel de son futur album HIStory sur les bords du Danube.
Accompagné de Lisa-Marie Presley , Michael Jackson veut emmener le gamin aux États-Unis pour le faire soigner mais le personnel médical refuse, invoquant des contacts avec la Belgique. Ni une ni deux, Michael décide de payer l'opération pratiquée en décembre 1995 dans une clinique bruxelloise réputée au niveau international.
«Son visage était tout vert mais il avait cette lumière, cette étincelle dans les yeux. J'ai demandé à son infirmière quel était le problème de cet enfant. Elle m'a dit qu'il avait besoin d'un foie en urgence et qu'il mourrait s'il ne recevait pas de greffe. Il était hors de question que je laisse s'éteindre cet adorable petit ange. J'ai remué ciel et terre pour trouver une solution et j'ai été soulagé quand on m'a appelé pour m'apprendre qu'il serait finalement opéré. J'étais si fier d'avoir pu l'aider. Dieu le bénisse. Je t'aime Farkas [Farkas est le nom de famille du gamin que Michael Jackson confondait avec son prénom Béla –aujourd'hui Tamás]», témoignera la star des années plus tard dans une émission de télévision américaine de la Fox.

 

Le troisième greffon fut le bon.
L'information reste secrète jusqu'en avril 1997. La presse bruxelloise évoque alors une ardoise de 3 millions de francs belges (75.000 euros) équivalant à la moitié des frais comptabilisés.
Au bout de deux années d'impayés, le service financier de l'hôpital mandate un avocat comme le stipule la procédure prévue dans ce genre de cas de figure. La fondation de Michael Jackson règle le litige deux à trois semaines après la médiatisation de l'affaire et l'info passe complètement inaperçue en Belgique. Tamás effectuera des aller-retour Hongrie-Bruxelles jusqu'en 2002 dans le cadre de son suivi médical.
Un quart de siècle après l'intervention, le chirurgien chargé d'opérer Tamás est toujours de ce monde.

L'expertise du minutieux praticien bruxellois et la mobilisation de l'une des plus grandes icônes de la musique moderne ont épargné au garçon une issue vraisemblablement fatale vu la gravité de son cas.
«Les infirmières de Saint-Luc étaient adorables avec moi, même si je les faisais tourner en bourrique pour regarder la version allemande du Roi Lion dont je ne captais absolument rien. Une femme-médecin m'ameneait discrètement des bonnes choses malgré mon régime alimentaire strict», plaisante celui qui est aujourd'hui marié, papa de deux enfants et propriétaire d'une modeste maison achetée avec l'aide de l'État. «Les deux premiers greffons ont été rejetés par mon organisme mais pas le troisième. Sans Michael et le professeur Otte, je ne serais certainement plus là», confie le jeune homme âgé de 28 ans.

Ours géant
Sur l'armoire de son salon servant également de chambre pour son bébé –Tamás (7 mois)–et le couple parental, le miraculé y consacre un mini-mausolée à la gloire de son célèbre bienfaiteur.
Ici, une photo pré-opération avec Michael et Lisa-Marie depuis la chambre de l'hôtel Kempinsky de Budapest où la star aimait prendre ses quartiers en Hongrie. Là, une image post-intervention de 1996 lorsque Jackson invita Tamás et sa famille adoptive à assister en loge VIP au concert magyar de sa tournée «HIStory». Au centre du meuble, une lettre accompagnant l'énorme ours en peluche offert par Michael.

 

Lisa, l'ours en peluche offert au jeune garçon par le King of Pop.

Faute de place dans sa limousine noire, Michael aurait spécialement loué les services d'un hélicoptère afin que le cadeau baptisé Lisa et chouchouté par son destinataire arrive à bon port. L'animal brun accompagna Tamás durant toute son enfance et reste entier malgré les années écoulées.
Le Pinocchio en bois qui veillait sur le petit patient au-dessus du lit d'hôpital et de la table d'opération a en revanche été dépossédé d'un bras et de deux souliers noirs. Sur d'autres clichés, on voit Tamás cajoler Lisa dans l'hôtel voisin de la clinique ou rire en traînant son chariot à perfusions.
«Les souvenirs sont loin mais je me rappelle des voyages en hélicoptère médicalisé vers la Belgique et du long trajet en voiture avec mes parents adoptifs pour un contrôle à Bruxelles.
«Mes parents naturels étaient très jeunes et n'avaient pas un sou quand je suis tombé malade. Les suivants ont pris soin de moi jusqu'à ma majorité mais nos relations se sont dégradées et on se parle assez rarement depuis», souligne-t-il.

Lorsque le chanteur mourut subitement le 25 juin 2009, Tamás laissa couler quelques larmes. Il brûle un cierge pour celui qu'il considère comme un second père à chaque Toussaint et ne croit pas un seul mot des accusations de pédophilie alimentant le docu-choc Leaving Neverland.
«Honnêtement, c'est une blague. Michael était un homme bon incapable de faire du mal à qui que ce soit. Si une chose aussi grave m'était vraiment arrivée à moi ou à l'un de mes deux enfants, je n'aurais pas attendu trente ans pour porter plainte», riposte celui pour qui Michael se prit d'affection en 1994.
«Je continue d'écouter régulièrement sa musique et apprécie particulièrement “We Are The World”. Mon rêve est d'aller visiter sa tombe aux États-Unis même si je sais que je n'aurai certainement jamais les moyens de m'y rendre», déplore le rescapé sous l'immense cerisier dominant la cour de sa maison, occupant l'emplacement d'une ex-épicerie clandestine.

À l'intérieur, sa fille Kinga se gave de dessins animés dans sa chambre pendant qu'Héléna mitonne une casserole complète de spaghetti bolognaise qui suffirait à nourrir une compagnie d'infanterie tout entière. Tamás engloutit son assiette en deux temps trois mouvements .

Tamás junior aura son propre repaire dans l'ancienne entrée du magasin quand papa et ses amis se seront débarrassés du bois pourri au sol et de l'odeur de renfermé de la pièce longtemps inoccupée. En attendant l'âge d'intégrer son refuge, le bambin passe ses nuits parmis ses parents dans le salon qui fait à la fois office de chambre à coucher, avec télévision câblée, meubles à l'ancienne et souvenirs de la pop-star.
Grâce aux mains du professeur belge Jean-Bernard Otte et à la générosité inespérée de Michael, Tamás ne souffre plus physiquement mais un sentiment d'illégitimité reste dans son esprit.
«Je me demande souvent ce qui l'a poussé à me choisir au milieu des dizaines d'enfants rencontrés à l'hôpital Bethesda ce jour d'août 1994. Pourquoi s'est-il penché à mon chevet? Pourquoi s'est-il intéressé à mon sort alors que j'étais sur le point de mourir? Pourquoi m'a-t-il aidé? Pourquoi moi et pas un autre?» La question restera probablement sans réponse jusqu'à son dernier souffle.

 

Source: TV2 Magyarország